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Réfléchir ou refléter

Pendant zazen, il est recommandé de ne pas réfléchir.
Ainsi, paradoxalement, la « méditation » n’est pas une méditation sur un sujet comme une concentration unipointée et imprégnée sur un thème donné.
Évidemment le mental est ainsi fait (ou conditionné) que l’on ne peut s’empêcher de réfléchir, ce qui est un mécanisme normal de la pensée. Elle semble faite pour çà, être là pour çà.

Mais, il s’agit de s’apercevoir que demeurer fixé dans la réflexion, c’est rester à échafauder des hypothèses d’un monde par nature recrée mentalement et donc faux par conséquent.

C’est la prise de conscience de l’échafaudage du mirage qui permet de dépasser l’illusion du mirage.
Sinon, on demeure de simples catadioptres qui réfléchissent la Lumière.

Réfléchir, c’est entrer dans la division et surtout la prendre pour vraie, fonder la différence et ne plus faire la distinction Claire entre ses divagations et constructions psychiques et la réalité.

Pour autant, réfléchir est très utile, très précieux, philosophiquement nécessaire (qui ne peut pas ne pas être).
La fixation des éléments de la cognition, du langage, d’élaboration du classement, de projection de projets, de capacité de mémoire est une haute faculté humaine dans sa dimension d’en prendre conscience.

Pouvoir concevoir, c’est projeter une faculté de créer, dresser les éléments d’un plan d’architecture, prévoir l’avenir et donc potentiellement l’ordonner.
C’est d’ailleurs pour cette raison que la dérive se fait.

L’esprit se voit omnipotent, fasciné qu’il est par ses propres réalisations et ses propres supputations.
Le fait d’expérimenter le possible devenant réel incite l’esprit à peu d’humilité et surtout à demeurer fixé à cette imagerie virtuelle.
Dessiner la carte est infiniment utile pour s’orienter et comprendre la géographie (quoique nos vaisseaux spatiaux n’aient pas exploré tous les confins des cartographies possibles).

Mais prendre la carte pour le territoire est un mirage facile à déjouer. Il n’y aura jamais sur la carte ou le GPS le plus sophistiqué le chant des ruisseaux, la blancheur de l’aube, le bruit du moteur de la voiture ou les ampoules aux pieds.

Voir se coucher le soleil ne sera jamais aussi beau que l’imaginer, alors que notre civilisation idéaliste croit le contraire et s’y réfugie.
Or, tout se passe comme si le coucher de soleil imaginé était plus beau que le vrai !

Jean-Marc Bazy

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